mardi 30 mars 2010

Invitation au Café Psycho d'Avril


Nous vous invitons à nous rejoindre lors de la prochaine rencontre du Café psycho qui aura lieu:

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Le Jeudi 1er avril 2010

En salle C 306, à partir de 17h

Pour échanger, débattre, s’informer, penser autour du thème :

« Psychiatrie de secteur & psychothérapie institutionnelle »

à partir des interrogations suivantes : en quoi ce type d’approche intéresse-t-il le psychologue clinicien dans sa pratique ? D’où lui viennent ces outils ? Comment peut-il les manier ?

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Intervenants
Agnès Berthomeux, présidente de la SERHEP (Société d’Etudes et de Recherches Historiques en Psychiatrie de Ville-Evrard), psychologue dans un Centre Médico-Psychologique.
Elie Pouillaude, chargé de cours à Paris 13, psychologue dans un Centre Médico-Psychologique de consultation et de cure ambulatoire.

Cette rencontre, aura la particularité de s’articuler en deux temps : première rencontre le jeudi 1er avril à 17h en C306 et deuxième rencontre le vendredi 16 avril à 14h en dehors des murs de l’Université. En effet, pourquoi ne pas interroger ce courant de désaliénation qui a permis de faire tomber les murs des asiles en France en déplaçant le Café-Psycho hors les murs de l’université ?

http://cafepsycho.blogspot.com/

jeudi 25 mars 2010

Compte rendu du Café Psycho de Mars 2010

Bonjour à tous,



La rencontre de ce mois de mars a commencé par la projection de plusieurs extraits du film La Vague, réalisé en 2008 par Dennis Gansel. Il s’agit de l’histoire d’un professeur de lycée qui propose à ses élèves, lors d’une semaine thématique, une expérience visant à leur expliquer le fonctionnement d'un régime totalitaire. Commence alors un jeu de rôle grandeur nature durant lequel ce professeur organise une communauté fonctionnant comme une unité possédant un symbole, un salut, un uniforme, des règles : la vague. Cependant certains lycéens prennent la situation très au sérieux, elle finira par devenir incontrôlable.

Ce film est très largement inspiré de La Troisième vague, étude expérimentale du fascisme, menée par le professeur d’histoire Ron Jones avec des élèves de première du lycée Cubberley à Palo Alto pendant la première semaine d’Avril 1967. Cette expérience pédagogique avait pour but de faire comprendre les mécanismes du "suivisme", tel qu'il a pu être vécu par les Jeunesses Hitlériennes lors du IIIème Reich. N’arrivant pas à expliquer à ses élèves comment les citoyens allemands avaient pu, sans réagir, laisser le parti nazi procéder au génocide de populations entières, Ron Jones décida d’organiser une mise en situation. Il fonda un mouvement nommé « La Troisième Vague », dont l’idéologie vantait les mérites de la discipline et de l’esprit de corps, et qui visait à la destruction de la démocratie, considérée comme un mauvais régime en raison de l’accent qu’elle place sur l’individu plutôt que sur la communauté.

Si vous désirez avoir davantage d’informations sur cette étude et sur son déroulement, vous pouvez consulter cet article.

Difficile de rester indifférent devant de telles images. La plupart des participants ont été interpellés par ce film, qu’ils visionnent pour la première fois ou non. D’ailleurs, on sent la charge affective que provoquent en nous ces extraits, à la vue du silence qui s’installe au départ.
Après avoir, pour certains, exprimé ces affects pénibles, un certain nombre d’éléments nous interpellent et de nombreuses questions se posent :
  • Comment aurions-nous agi dans une situation similaire ?
  • Conscient des enjeux de ce film et des différentes stratégies de manipulation étudiés lors notre formation, ne serions-nous pas également pris par ce mouvement ?
  • Comment cela peut se produire ? Quels mécanismes sont mobilisés ?
  • Par quel processus en vient-on à ne plus penser ?
  • Pourquoi obéissent-ils ?

Le parallèle avec l’expérience de Milgram est alors énoncé. Cependant, ici, l’obéissance n’est pas liée à l’autorité du savoir (autorité attribuée par le cadre universitaire et le symbole des blouses blanches). D’ailleurs, plutôt que de parler d’obéissance, on évoquerait davantage la notion d’adhésion à un groupe avec idéalisation et identification au leader charismatique mais également identification aux autres membres. Ces identifications permettent de construire des liens forts et une cohésion importante au sein du groupe. De plus, selon Le Bon, chacun des membres déposerait son idéal du moi dans le leader. Cette identification faciliterait une plus grande cohésion et un plus grand contrôle.

Pourquoi adhérer au groupe ? Nous appartenons tous à différents groupes : sociaux, culturels, politiques, religieux, phénomènes de mode vestimentaires, musicales, littéraires… La question était donc plus pour nous de tenter de comprendre pourquoi un groupe d’individus peut basculer dans un fonctionnement qui disqualifie l’individu au profit du groupe, entrainant alors une impossibilité de penser. La question de la quête d’appartenance ainsi que l’affaiblissement du modèle autoritaire sont des éléments de réponse (gardons, de plus, à l’esprit que ce sont deux modèles actuellement en crise). Notre discussion s’est finalement orientée du côté des repères ; peut-on dire qu’il est plus facile à des individus en manque de repères stables de se laisser embrigader dans de tels groupes ? Et qu’en est-il dans notre société où l’individu est au contraire aux prises avec une multitude de repères ? N’est-ce pas autant instable ?

De plus, l’adhésion à la communauté offre des bénéfices secondaires à chacun des membres ainsi qu’au leader. Chacun trouve une place dans laquelle il se sent reconnu, qui lui apporte une sécurité affective et à partir de laquelle, il peut accomplir des désirs. D’où un sentiment de satisfaction et d’euphorie ainsi que se « laisser aller » voire cet engouement pour la communauté.
Tous ces bénéfices secondaires expliquent certainement l’attrait que chaque membre a vis-à-vis du groupe mais aussi les résistances à s’en dégager.

La difficulté à s’en dégager peut également être le fruit du clivage entre le dehors et le dedans. De tels groupes autoritaires, autocratiques trouvent leur cohésion et leur solidité grâce à ce clivage qui disqualifie l’autre : on est avec le groupe ou on est contre. Il n’y a pas d’autre alternative. On comprend bien la difficulté à se dégager du groupe (et même la difficulté à ne pas y adhérer) : car s’en éloigner, c’est devenir un ennemi contre lequel il faut lutter. Il s’agit donc de se retrouver seul contre ce groupe solide et cohésif (place qui est subjectivement difficile à tenir). Enfin, ce clivage protège le groupe de la remise en question (dont l’un de ses aboutissements pourrait être son implosion).

Il y a une véritable attaque de la pensée. Chacun des membres se démet de sa pensée et délègue le questionnement au leader (lui-même démuni de cette pensée par la perte de contrôle). En lui obéissant, chacun se désengage de toute responsabilité personnelle. L’appartenance à un groupe désinhibe et rend l’acte plus facile car chacun des membres est soutenu par les valeurs inscrites par le groupe. De même, comme le souligne Anzieu, le groupe est différent de la somme des individus qui le composent, ce qui permet à chacun des membres de ne plus se sentir seul, individuel, éphémère, mais lui donne une force par un groupe qu’il juge comme permanent. Avec cette attaque de la pensée, le sentiment qui ressort est que le groupe peut être assimilé à quelque chose de symbiotique, d’archaïque. D’ailleurs, selon Le Bon, la communauté est comme un corps composé de cellules. La référence au corps, et tout le vocabulaire utilisé tel que « les membres », renforce cette idée d’archaïque.

Avec ce film, apparaît une autre vision du leader autocratique. Vu habituellement comme un manipulateur contrôlant la situation, le film nous montre qu’il est lui-même submergé par ce mouvement qu’il ne contrôle plus, qu’il est lui-même manipulé par un processus qui le dépasse. La question de l’auto-manipulation se pose ici : aussi bien pour le leader que pour les membres de la communauté.

Pour finir, comment faire pour ne pas être influencé par de tels groupes ? On ne peut pas échapper à l’influence. La seule solution est de multiplier les influences ce qui permet à chacun de réfléchir par soi-même et de critiquer, dans le but de ne pas se laisser manipuler. Cela est-il suffisant ? Difficile d’y répondre mais il semblerait que ce soit l’alternative la plus satisfaisante.

Informations complémentaires sur l'expérience de Ron Jones

Le film La Vague est inspiré de la Troisième Vague, étude expérimentale du fascisme, menée par le professeur d’histoire Ron Jones avec des élèves de première du lycée Cubberley à Palo Alto pendant la première semaine d’avril 1967. Cette expérience pédagogique avait pour but de faire comprendre les mécanismes du "suivisme", tel qu'il a pu être vécu par les Jeunesses Hitlériennes lors du IIIème Reich.

N’arrivant pas à expliquer à ses élèves comment les citoyens allemands avaient pu, sans réagir, laisser le parti nazi procéder au génocide de populations entières, Ron Jones décida d’organiser une mise en situation. Il fonda un mouvement nommé « La Troisième Vague », dont l’idéologie vantait les mérites de la discipline et de l’esprit de corps, et qui visait à la destruction de la démocratie, considérée comme un mauvais régime en raison de l’accent qu’elle place sur l’individu plutôt que sur la communauté.


Chronologie de l’expérience selon Jones

  • Lundi : Jones donne une allocution sur la discipline. Il passe ensuite aux travaux pratiques et indique une position assise susceptible de faciliter la concentration et la volonté. Les élèves doivent se lever, commencer leur réponse par « Monsieur Jones » et répondre en quelques mots seulement.
  • Mardi : la devise du mouvement : « La force par la discipline, la force par la communauté ». Jones analyse l’idée de communauté qu’il définit comme le lien unissant différentes personnes tournées vers un but commun. Ron Jones ordonne ensuite aux élèves de réciter la devise du mouvement et leur enseigne un salut. Il décide de nommer le mouvement « La Troisième Vague », expliquant aux élèves que c'est à la fois parce que la main lors du salut ressemble à une vague sur le point de déferler, et parce que, conformément à une croyance populaire, les vagues de l’océan avanceraient par groupes de trois, la troisième étant la plus forte. Il omet de mentionner aux élèves la référence la plus importante, qui est bien sûr la référence au Troisième Reich.
  • Mercredi : Il distribue des cartes de membre aux élèves participant au mouvement. Ron Jones donne une allocution sur l’action, entendue comme but vers lequel tendent la discipline et la communauté, et sans lequel elles perdent tout leur sens. Plusieurs élèves lui expriment leur satisfaction et leur joie de participer à la « Troisième Vague ». Les élèves semblent perdre leurs aptitudes à argumenter et à nuancer. Jones constate que la « Troisième Vague » prend des proportions inquiétantes (dénonciation à tout va, menaces envers ceux qui sont contre le mouvement, investissement excessif).
  • Jeudi : L’expérience perturbe la vie du lycée de manière manifeste (quatre vingts élèves au lieu de trente ; certains sèchent les cours pour assister à ceux de Jones…). Inquiet de l’ampleur et de la tournure que prennent les événements, sentant l’expérience lui échapper, incertain de ses propres motivations pour poursuivre, Ron Jones décide d’en finir. Après une allocution sur la fierté, il annonce que la « Troisième Vague » n’est pas seulement une mise en situation au sein du lycée, mais bel et bien un projet d’ampleur nationale destiné à modifier en profondeur la vie sociale des États-Unis. Il prétend que d’autres enseignants ont, comme lui, fondé des « Troisièmes Vagues » partout dans le pays et que, le lendemain, à midi exactement, le leader national du mouvement s’adressera aux jeunesses de la Troisième Vague. Il s’appuie sur la volonté des membres pour organiser en vingt-quatre heures une réunion exemplaire.
  • Vendredi : conférence au lycée. Deux cents étudiants assistent à la réunion. À midi, les portes sont closes et des gardes postés de faction. Ron Jones montre à ses amis l’obéissance aveugle des jeunes présents : il les fait saluer et leur fait réciter la devise du mouvement. À midi cinq, Ron Jones fait éteindre les lumières et allumer des écrans de télévision, annonçant le discours du leader national. Après quelques minutes de silence attentif devant les postes ne montrant que de la « neige », les élèves finissent par s’apercevoir de la supercherie. Coupant court à leur stupeur, Ron Jones procède à un « débriefing » : il explique comment il les a manipulés et dans quelle mesure ils se sont laissés manipuler. Il leur montre à quel point il est facile de verser dans le totalitarisme. Il clôt l’expérience.

Le malaise qui prédominait à la fin du dernier cours ainsi que la peur a conduit à conserver une grande pudeur sur l’expérience. Les sources fiables sur l’expérience sont donc rares. Aussi, réunir des informations fiables sur le déroulement réel des événements semble aujourd’hui très difficile. Sans l’accuser de déformation volontaire, force est de reconnaître que les nombreuses divergences entre les sources rendent hasardeux tout examen impartial de l’expérience. D’un point de vue sociologique, le fait que le public semble prêt à accorder crédit à la « Troisième Vague » telle qu’elle est relatée dans les adaptations artistiques pourrait en lui-même provoquer un questionnement et constituer un objet d’étude.

lundi 1 mars 2010

Invitation au Café Psycho de Mars 2010



Nous vous invitons à nous rejoindre lors de la prochaine rencontre qui aura lieu:


Le Jeudi 4 Mars 2010

En salle C306, à 17h00




Pour échanger, débattre, s’informer, penser autour de:

l’Autocratie

à partir d’extraits du Film
La Vague de Dennis Gansel



Vous ne connaissez pas le Café Psycho ?
Venez-vous informer sur notre blog :

http://cafepsycho.blogspot.com/

Compte rendu du Café Psycho de Février 2010

La rencontre du Café Psycho du 4 février nous a permis d’évoquer et de débattre autour des concepts d’influence et d’interaction. Pour cela, nous sommes partis d’une mise en situation permettant d’expérimenter ensemble ces notions.

Le principe ? Nous avons proposé aux participants de se mettre debout, en cercle, et de choisir silencieusement deux personnes au choix. Une fois ce choix fait, la consigne était de se déplacer dans la salle de telle sorte que chaque participant soit à égale distance des deux personnes qu’il avait choisies au préalable.

Nous nous sommes alors rendu compte de la complexité de cette situation : chaque mouvement effectué entraînait le déplacement de tous. Un bon nombre de ressentis furent alors partagés. L’interaction entrainée par cette situation a fait émerger des émotions, sentiments, interprétations proches de ceux qui nous animent en société. Nous avons également pu observer l’attrait et la curiosité que pouvaient susciter cette mise en situation, certains changeant de position afin que le mouvement poursuive.

Très vite, cette mise en situation nous a permis d’évoquer un certain nombre de concepts autour de la notion d’influence. En premier lieu, nous avons parlé de « l’effet papillon » (métaphore de la théorie du chaos) et de l’approche systémique comme deux exemples qui permettent d’aborder les concepts de système, d’interactions, de rétroactions, de régulations, d’organisation, etc.

Chacun des participants a pu ainsi réfléchir aux liens qui nous unissaient, que nous soyons en contact direct ou non avec les personnes qui nous entourent (les personnes que nous avons choisies dans cette mise en situation et les autres). Quoi que l’on fasse, nous influençons toujours notre environnement. A plus grande échelle, nous avons pu évoquer le phénomène sociétal mais aussi l’investissement du psychologue dans sa profession. Doit-il prendre en compte l’individu, l’environnement, ou l’individu dans son environnement ? Un membre souffrant provenant d’une famille doit-il être traité seul, ou avec les autres membres ? Qu’en est-il alors de la cure psychanalytique qui s’effectue entre un analyste et un sujet seul ? Un changement chez le patient, à la suite de cette thérapie, n’aurait-il pas une influence sur les autres membres de la famille ? Faudrait-il donc s’intéresser à l’ensemble de ses relations ? Est-ce envisageable et convenable ? Et comment ?

La question du désir, de la demande est un élément important à prendre en compte. Car le désir ou du moins la demande est au centre de toute thérapie. Sans cela, aucun changement ne peut être amené dans le fonctionnement du sujet, et donc de son environnement.

La question du choix est alors apparue (choix déjà évoqué au moment où nous avons décidé de suivre arbitrairement deux personnes). Car oui, les influences sont nombreuses et précèdent notre existence, mais le libre arbitre est toujours.

Pour finir, afin d’exposer l’importance des influences, la référence au film « la vague » a été évoquée. Ce film relate une expérimentation tragique concernant la possibilité (ou impossibilité) de ne subir aucune influence. La projection d’un extrait de ce film suivi d’un débat a été envisagée comme thème d’une prochaine rencontre.